Taux AT/MP : les entreprises nouvellement créées sont exclues du régime de franchissement de seuil


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En principe, selon l’effectif global de l’entreprise à laquelle il appartient, chaque établissement est soumis à (articles D.242-6-2 et R.130-1 du code de la sécurité sociale) :

  • la tarification collective (entreprises de moins de 20 salariés) : le taux de la cotisation AT/MP, dit « taux collectif », est alors déterminé par la Carsat en fonction du barème national, publié chaque année au Journal officiel, fixant le taux applicable pour chaque code risque ;
  • la tarification individuelle (entreprises d’au moins 150 salariés) : le taux est alors calculé par la Carsat en tenant compte du coût des maladies ou accidents professionnels survenus au sein de l’établissement et inscrits à son compte au cours de la période triennale de référence (années N−4 à N−2), ce coût étant déterminé selon un barème national publié chaque année au Journal officiel ;
  • la tarification mixte (entreprises dont l’effectif est d’au moins 20 et de moins de 150 salariés) : dans ce cas, le taux applicable est pour partie déterminé par tarification collective et pour partie par tarification individuelle.

Toutefois, par exception, selon l’article D.242-6-17 du code de la sécurité sociale, les taux nets collectifs sont applicables aux établissements nouvellement créés durant l’année de leur création et les deux années civiles suivantes, quel que soit leur effectif ou celui de l’entreprise dont ils relèvent, soit pendant trois ans. À l’expiration de ce délai, les taux nets collectif, mixte ou individuel sont applicables à ces établissements en fonction de leur effectif ou de l’effectif de l’entreprise dont ils relèvent.

► En ce qui concerne l’appréciation de l’effectif pour la tarification des accidents du travail et maladies professionnelles, il convient de tenir compte de la dernière année connue (année N−2) en application de l’article L.130-1, I al. 2 du code de la sécurité sociale.

Par ailleurs, l’article L.130-1, II du code de la sécurité sociale prévoit un mécanisme d’atténuation des effets de dépassement de seuil selon lequel le franchissement à la hausse d’un seuil d’effectif salarié est pris en compte lorsque ce seuil a été atteint ou dépassé pendant cinq années civiles consécutives.

La question posée à la Cour de cassation était de savoir si, pour un établissement nouvellement créé, le passage du taux collectif à un taux net mixte ou individuel devait attendre que le seuil d’effectif soit franchi pendant cinq années consécutives, selon le mécanisme d’atténuation du franchissement de seuil prévu par l’article L.130-1, II du code de la sécurité sociale. 

Une entreprise nouvellement créée conteste un changement de taux AT/MP

Dans cette affaire, la Carsat de Rhône-Alpes a notifié à une société, créée en 2018, un taux net collectif pour les années 2018 à 2020, conformément à l’article D.242-6-17 du code de la sécurité sociale. Ce dernier a été maintenu en 2021. A partir de 2022, la caisse a appliqué un taux mixte, en raison de l’effectif de la société compris entre 20 et 149 salariés.

► Selon l’article D.242-6-17 du code de la sécurité sociale, n’a pas la qualité d’établissement nouveau celui issu d’un précédent établissement exerçant une activité similaire avec les mêmes moyens de production et reprenant au moins la moitié du personnel. Si l’un de ces critères fait défaut, l’établissement est nouveau (arrêt du 30 juin 2011 ; arrêt du 21 janvier 2016). Un établissement qui abandonne son activité principale peut également être considéré comme nouveau (Cass. 2e civ., 1 févr. 2024 n° 22-10.368 F-B). Néanmoins, une baisse importante d’effectif sans modification de la nature de l’activité, de la structure juridique de l’établissement ou des moyens de production ne confère pas la qualité d’établissement nouveau (arrêt du 9 juillet 2020).

Contestant ce changement, la société a saisi la juridiction de la tarification pour s’opposer à l’application anticipée du taux mixte, estimant que la règle de stabilité sur cinq ans devait s’appliquer. Elle entendait bénéficier pendant les trois premières années de son existence du régime prévu par l’article D.242-6-17 du code de la sécurité sociale pour un établissement nouvellement créé, soit d’un taux collectif, quels que soient ses effectifs. Puis à compter de la quatrième année civile, l’article L.130-1 du code e la sécurité sociale devait selon elle prendre le relais et le taux collectif applicable initialement devait être maintenu jusqu’à ce que le franchissement de seuil d’effectif soit confirmé pendant cinq années consécutives. En effet, l’entreprise considérait que ce mécanisme d’atténuation des franchissements de seuil s’applique à tous les établissements, y compris les « anciens » établissements nouvellement créés.

Les règles de franchissement de seuil ne s’appliquent pas pour les taux AT/MP des entreprises nouvellement créées

S’appuyant sur les articles D.242-6-17 et L.130-1, II du code de la sécurité sociale, la Cour de cassation rejette cette prétention et considère que le régime de franchissement de seuil sur cinq ans ne s’applique pas à la situation d’un établissement nouvellement créé, à l’issue de la période initiale des trois ans de « gel » du taux.

Pour elle, le premier calcul d’effectif après la période de trois ans applicable à une entreprise nouvellement créée ne constitue pas un franchissement de seuil au sens de l’article L.130-1, II du code de la sécurité sociale.

► Ce faisant, la Cour de cassation retient une interprétation stricte des textes applicables et refuse d’en faire une lecture combinée. Mais on peut comprendre que la société ait été dans le doute, dans la mesure où le changement de taux n’a été opéré qu’en 2022 et non à l’issue des 3 ans en 2021.

La cour d’appel, ayant constaté que la société avait atteint, dès sa création, le seuil d’effectif correspondant au taux mixte, la Cour valide donc la décision de la caisse d’appliquer un taux mixte dès 2022, sans attendre cinq années de franchissement de seuil. Elle considère que le maintien du taux collectif en 2021 était une erreur, et que la caisse a correctement rectifié la situation. La caisse n’avait pas à attendre que le franchissement de seuil soit confirmé durant cinq années civiles consécutives suivant la période de trois ans.

Le pourvoi est rejeté.

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Sophie André
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Dans un arrêt du 16 octobre 2025, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation clarifie l'articulation entre les règles de tarification AT/MP pour les établissements nouvellement créés et le mécanisme de franchissement de seuil d'effectif. Le premier dispositif exclut l'application du second.
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